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Deux Français dénoncent les sévices subis à Guantanamo

Le Figaro
by Jean Chichizola
October 16, 2007


COUPS, menaces, humiliations... L’enquête française sur les conditions de détention dans le camp de Guantanamo est entrée dans le vif du sujet. Deux anciens prisonniers de la base américaine qui ont porté plainte en 2002 pour « arrestation illégale et détention arbitraire » ont été entendus à Paris fin octobre par les magistrats instructeurs Sophie Clément et Nathalie Frydman. Mourad Benchellali, 24 ans, et Nizar Sassi, 26 ans, ont évoqué les mauvais traitements subis entre leur arrestation au Pakistan en décembre 2001 et leur retour en France en juillet 2004. Leurs déclarations seront sans doute contestées par la partie adverse mais il est à noter qu’elles recoupent en partie les déclarations du détenu français Ridouane Khalid (nos éditions du 23 mars 2005) et celles de prisonniers d’autres nationalités relâchés ces dernières années. En 2004, le général américain George Fay indiquait que « les techniques utilisées à Guantanamo incluaient l’usage de positions inconfortables, l’isolement pour une durée pouvant atteindre trente jours, la mise à nu [des prisonniers] et l’utilisation de leurs phobies, comme l’usage de chiens ». « On nous urinait dessus » Selon Mourad Benchellali et Nizar Sassi, les violences ont en fait commencé avant leur arrivée sur la base. Arrêtés au Pakistan, ils sont transférés en décembre 2001 à Kandahar (Afghanistan). Selon Mourad Benchellali, ils y auraient été « frappés, déshabillés, humi liés ». « Ils nous empilaient les uns sur les autres alors que nous étions nus et prenaient des photos. Ils nous insultaient et nous crachaient dessus. » Le Français aurait été également « interrogé plusieurs fois par jour ». « Ils nous menottaient dans des positions douloureuses comme, par exemple, liés à une barre au-dessus de notre tête ou attachés bas dans le dos. » Nizar Sassi déclare de même avoir été frappé dès son arrivée à Kandahar. « Nous sommes passés par différentes tentes, explique-t-il. Dans l’une on était frappé, dans l’autre on nous montait dessus, dans une troisième, on nous urinait dessus. » Les deux Français indiquent avoir rencontré des représentants du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) quelques jours après leur arrivée. Ils décrivent toutefois une « Croix-Rouge impuissante » et des représentants ne pouvant « faire grand-chose ». Transférés à Guantanamo en janvier 2002, ils auraient été passés à tabac dans le bus les amenant au camp. Ils sont revenus sur les méthodes d’interrogatoire. « J’avais pris le parti de répondre [aux] questions, a expliqué Sassi, d’autres résistaient et alors ils étaient punis. » Exemple de punition : le harcèlement dans leur sommeil, des gardes les faisant bouger toutes les quarante-cinq minutes. Flashs de lumière Mourad Benchellali évoque d’autres méthodes : « Ils pouvaient nous mettre dans une salle avec de la musique très forte diffusée par de grosses enceintes, dit-il, ou nous faire subir des flashs de lumière plusieurs heures de suite. [...] Parfois, ils nous laissaient des heures menottés sur une chaise ou alors ils mettaient la climatisation à fond pour que l’on ait froid. » « Bien sûr, ajoute le témoin, il y a aussi les coups ou alors les humiliations comme de ne raser que la moitié des cheveux ou de la moustache ou seulement un sourcil sur deux. » Les avocats des deux Français devraient à présent demander aux magistrats instructeurs qu’un certain nombre de responsables américains soient entendus afin de s’expliquer sur ces déclarations. Contactés par Le Figaro, les services de l’ambassade des Etats-Unis à Paris n’ont pas souhaité réagir.

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